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Projet de loi Énergie et Climat : ce qu’en pense le Conseil d’État

Environnement & qualité - Environnement
Public - Environnement
09/05/2019
Faisant suite à la présentation du projet de loi relatif à l’énergie et au climat lors du dernier Conseil des ministres (voir notre actualité du 2 mai 2019), le Conseil d’État s’est prononcé sur ledit projet ainsi que sur l’étude d’impact l’accompagnant. Aux termes de cet avis, outre le constat de la brièveté du texte, il relève notamment quelques dispositions pour lesquelles des compléments s’avèrent nécessaires.
Le CE a ainsi formulé les observations suivantes :
— concernant l’objectif de neutralité carbone et l’application d’un facteur supérieur à 6 de division des émissions de gaz à effet de serre (GES) entre 1990 et 2050, ces deux objectifs ne « semblent pas incohérents » selon la Haute juridiction, notant que l’étude d’impact présente ce facteur comme un facteur de division compris entre six et huit ;
— sur le Haut Conseil pour le climat voué à se substituer au comité d’experts pour la transition énergétique mis en place par la loi de transition énergétique, le CE demande d’écarter du projet de loi les dispositions ayant trait à son organisation et à ses missions. En effet, il estime qu’« un tel organe, dont les attributions sont purement consultatives et dont l’intervention ne peut être regardée comme garantissant le respect d’un principe de valeur supra-réglementaire » relève du pouvoir réglementaire et non de la loi. En outre, le CE attire l’attention du Gouvernement sur la multiplication de tels organismes et juge opportun que les dispositions relatives à ce nouveau conseil prennent place au sein de « la partie du code de l’environnement où sont déjà prévues plusieurs institutions intervenant dans le domaine de la protection de l’environnement (livre Ier, titre III : Institutions) » ;
— quant au plafonnement d’émissions de GES annuel applicable, à compter du 1er janvier 2022, à certaines installations de production d’électricité à partir de combustibles fossiles et visant spécifiquement les quatre centrales à charbon encore en fonctionnement sur le territoire sur lesquelles il aura un effet immédiat, le CE estime que ce dispositif est valide juridiquement dans son principe au regard du motif d’intérêt général de réduction des émissions de GES. Toutefois, la sécurité d’approvisionnement, en tant qu’objectif majeur de la politique de l’énergie, ne devra pas être compromise et la sécurité juridique des exploitants devra être garantie par un délai suffisant entre l’adoption du texte et sa date d’entrée en vigueur. En revanche, sur l’accompagnement spécifique des salariés concernés par un licenciement économique dû à la fermeture de ces centrales, le dispositif envisagé par le Gouvernement « manque de précision et pose un problème d’articulation entre la loi et le décret ». Le Conseil suggère donc que sur ce point le Gouvernement légifère par ordonnance et propose que le projet de loi soit modifié en ce sens ;
— les dispositions relatives à l’examen au cas par cas préalable à une éventuelle évaluation environnementale dont le projet de loi attribue la compétence à une autorité administrative autre que l’autorité environnementale, ne présentent pas de difficulté juridique. L’intitulé du chapitre comportant ces dispositions devrait néanmoins être rectifié pour englober l’ensemble des projets qui relèvent d’un examen au cas par cas et non les seuls projets d’installations de production d’énergie à partir de sources renouvelables comme c’est le cas dans la version actuelle du projet de loi. Le titre de ce dernier serait, par conséquent, complété d’une référence à l’environnement.
 
Enfin, plusieurs remarques sont formulées concernant l’organisme tiers amené à contrôler les personnes sanctionnées dans le cadre du dispositif des certificats d’économies d’énergie (le CE écarte l’ensemble du dispositif proposé dans la version du texte qu’il retient), les habilitations du Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance pour appliquer plusieurs textes européens adoptés ou en cours d’adoption et le recours à la transaction pour permettre à la Commission de régulation de l’énergie (CRE) de régler les litiges portant sur la contribution au service public de l’électricité payée par les consommateurs au titre des années 2009 à 2015 (étude d’impact à compléter sur ce point).
Source : Actualités du droit